Univers des Arts

Fondation Taylor

Parmi les artistes ayant participé à rendre ses lettres de noblesse à la peinture fantastique contemporaine, Yo Coquelin se démarque depuis de nombreuses années dans ce champ artistique périlleux où l’imagination la plus pure et le sens du réalisme le plus aigu doivent s’entremêler sans retenue pour atteindre leur but.

Yo Coquelin dont l’œuvre peint est depuis longtemps un favori des collectionneurs d’art dit fantastique, se plaît à le rappeler lorsqu’on évoque l’attraction qu’exerce son travail sur le public : « La puissance de l’imaginaire est infinie. »

Parler de ses tableaux offre une bonne occasion de se pencher sur la nature profonde du réalisme fantastique en peinture, surtout lorsque de manière dommageable, celui-ci a été pendant longtemps injustement présenté comme une sous-catégorie picturale, un genre secondaire dont les contours ont parfois été mal définis et ce, particulièrement en France, moins dans les pays d’Europe du Nord. Pour traiter du réalisme fantastique en peinture, il faut commencer par tordre le cou à une erreur commune qui le laisse se confondre avec l’onirisme.

S’il peut être en pratique difficile de distinguer les deux courants autrement qu’en théorie, et si les deux notions sont presqu’interchangeables dans le langage commun, une différence fondamentale les oppose et permet au passage de restituer la force inhérente à la peinture fantastique :

Le Kimono d'apparat, H/T, 92x73cm

Le Kimono d’apparat, H/T, 92x73cm

là où le peintre onirique cherche à partager une vision issue de son esprit avec d’autres esprits, ceux des spectateurs, de faire rentrer, en somme, un morceau de son imaginaire à l’intérieur d’un autre imaginaire, le peintre fantastique cherche quant à lui à faire exister sa vision indépendamment de

tout imaginaire individuel, autrement dit à faire rentrer le spectateur dans l’image, et non l’inverse. L’onirisme vous dépeint un dragon pour que ce dragon existe dans votre esprit et ainsi rendre, tâche très noble et délicate, un rêve commun possible. Le fantastique, lui, vous dépeint un dragon pour que vous vous rendiez vous-mêmes dans le monde où ce dragon existe. Dans le premier cas, l’image est une porte d’esprit à esprit. Dans le second, elle est une porte de monde à monde. Une fois ce présupposé établi, on comprend ce que le réalisme fantastique a de très spécifique et exigeant : l’imagination cesse d’être le domaine de l’un pour devenir le domaine de tous. D’où la tension qu’on y trouve entre irréel et réalisme. Cette frontière peut sembler quelque peu artificielle et il est clair que de grands artistes comme Yo Coquelin, lorsqu’on prend le temps de s’imprégner de leur travail dans le temps long de leur carrière, ne sont pas réductibles à ce genre de définition. Il apparaît cependant que trop galvaudée par les appellations

médiatiques, la notion de réalisme fantastique mérite cette mise au point, ne serait-ce que pour affirmer ceci : lorsque Yo Coquelin crée, elle ne crée pas à la légère ; sa cible n’est pas la subjectivité d’un spectateur éthéré, mais l’objectivité d’un monde bien concret, voué à exister au-delà des ressentis.

C’est un fait connu que Yo Coquelin peint avec les techniques de la Renaissance. Devant la toile blanche, son désir d’ailleurs, son envie de formes, de couleurs, est une envie physique ainsi que le sont ses matières et ses outils. Son univers mental empli de références symboliques, mystiques et mythologiques témoigne d’une culture d’une indéniable étendue ; d’une véritable ouverture aussi. Yo Coquelin travaille en partant de taches colorées qui la guident comme des phares dans un univers nouveau supporté par la toile. Avec des craies ou des pastels, elle donne alors corps à sa vision qu’elle laisse se construire progressivement, comme on s’abandonne à une vision d’angoisse pour en exorciser la substance, et d’un chaos originel émerge un cosmos inédit. Travaillant toujours dans l’immédiat, sans esquisse ni dessin préparatoire, chacune de ses toiles vient s’ajouter à un édifice plus vaste comme une pierre taillée à une cathédrale : le temple ne peut être réduit à la main qui façonna la pierre. Cet ailleurs ne se trouve ni sur la toile, ni dans l’esprit, mais c’est un monde ouvert devant soi, un ailleurs qui existe maintenant.

Thibaud Josset

Du 29 septembre au 4 octobre 2022
Orangerie du Sénat
avec la S.N.B.A. (médaille d’or 2016)
15 rue Vaugirard
75006 Paris

Du 22 au 30 octobre 2022
Salon d’Automne
Avenue des Champs Elysées, Paris

Du 4 au 20 novembre 2022
Salon Déclic 22
Centre culturel Jacques Prévert
Avenue François Mitterrand
87700 Aixe sur Vienne

Du 5 au 27 novembre 2022
« Une porte entre deux mondes »
Artistes d’Artis Fictae Turma, invités d’honneur
Maison des Arts et de la Culture
Villa Médicis
3 rue Saint-Hilaire
94210 Saint Maur des Fossés
Contact atelier
yocoquelin@gmail.com
www.yocoquelin.com

Bouquet nippon, H/T, 195x130cm

Bouquet nippon, H/T, 195x130cm